Question n° 1 – Cause ou condition ?

Question

Dans le chapitre 5 de votre chaîne, vous avez énoncé le fait que nos six racines (vue, ouïe, odorat, toucher, goût et mental) constituent la cause, que les six objets (couleurs, sons, odeurs, objets tactiles et immatériels) constituent la condition, tandis que les six consciences constituent l’effet.

Or, dans le chapitre 6, vous dites que les objets représentent la cause, les racines représentent la condition et les consciences représentent l’effet. Pourquoi cette différence ?

 

Réponse

Malgré les apparences, il n’y a pas de contradiction. Il faut faire la distinction entre la notion de "production conditionnée" développée dans le bouddhisme primitif et celle développée dans le Grand véhicule, par Nāgārjuna notamment. Pour le premier, la "production conditionnée" représente une simple relation de cause à effet, alors que pour le second, elle représente une relation d’interdépendance.

 

Dans le grand véhicule, il y a donc interdépendance de toutes les existences, de sorte que les causes et les conditions peuvent s’intervertir.

Prenons l’exemple d’un gong. Lorsque je frappe sur le gong, un son est émis. On peut dire que pour obtenir l’effet du son, il faut la cause qu’est le gong et la condition qu’est le bâton. Mais on peut dire la même chose du bâton. Sans la condition du gong, la cause, le bâton, ne peut pas émettre l’effet du son.

D’ailleurs, d’où provient le son ? S’il provenait du gong, il n’aurait pas besoin de la condition du bâton pour sonner et sonnerait n’importe quand, tout seul, ce qui est impossible. Si le son était dans le bâton, le même son jaillirait, quel que soit l’objet frappé par le bâton. Si le son provenait d’ailleurs, le son du gong sonnerait n’importe où sans avoir besoin ni du gong, ni du bâton.

 

 

En fait, le son est produit par les conditions coordonnées du gong et du bâton. C’est la même chose que l’éveil du Bouddha. Si on suppose que la loi à laquelle il s’est éveillé existe préalablement en lui, c’est la même chose que de supposer que le son existe à l’état latent dans le gong. On tombe alors dans l’erreur de « la présence de l’effet dans la cause » (Inchū uka ron – 因中有果諭) énoncée par Kapila avant l’apparition de Shakyamuni. A l’inverse, si l’on pense que le son est ailleurs, on tombe alors dans l’erreur de "l'absence de l'effet dans la cause", (Inchū muka ron – 因中無果諭) thèse proposée par Uluka. Ce serait supposer que la loi à laquelle s’est éveillé le Bouddha (ou le son du gong) existent indépendamment, de manière autonome.

 

Or, il n’en est rien. L’éveil du Bouddha, comme le son du gong n’existent pas avant ou après ou ailleurs, mais de manière simultanée à la cause et à la condition.

 

De plus, en ce qui concerne le gong, « on obtient le nom de gong » parce qu’on l’utilise comme gong. On mettrait de la terre à l’intérieur et on y ferait pousser des plantes vertes, on obtiendrait le nom « pot ». SI l’on s’en sert pour faire la cuisine, on obtient le nom de marmite. En outre, s’il est simplement posé et qu’on ne l’utilise jamais, il n’y aura jamais l’effet du son, donc ni la cause, ni la condition. Le gong n’a donc pas de nature propre de gong, il tire son nom de sa fonction. Son véritable aspect, comme toute chose, est la vacuité.

 

 

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