Question n° 22

Qu'est-ce que la Terre de la Lumière sereine ?

 

Question

Bonjour à toutes et à tous.

 

Que signifie exactement, dans la cinquième Assise du Gongyō de la Nichiren Shōshū : "que moi comme autrui, apaisés, retournions ensemble à la lumière sereine » ?

 

Une personne qui m’est très proche pense qu'elle se trouve dans un état ou un lieu similaire, grâce à une révélation ou un appel divin qu'elle a vécu quelques mois après avoir traversé une épreuve difficile, ce qui l'a poussée à se faire baptiser !

 

J'avoue que je ne sais pas quoi lui répondre... 

 

Réponse

Bonjour

Tout d’abord, il est curieux de noter que toutes les « apparitions divines », les « appels de Dieu » semblent souvent s'inscrire dans un cadre conceptuel préexistant. Ce phénomène a intrigué certains chercheurs tant en théologie qu'en psychologie.

Voici quelques pistes qu’ils ont développées :

  • Le rôle de la culture et de l’éducation :
    • Cadre de référence : Notre culture et notre éducation nous fournissent un ensemble de concepts, de symboles et de croyances qui façonnent notre façon de percevoir le monde et d'interpréter nos expériences. Lorsque nous faisons face à des événements inhabituels ou inexplicables, nous avons tendance à les interpréter à travers le prisme de ce que nous connaissons déjà.
    • Langage et communication : Les "messages divins" sont souvent exprimés à travers des symboles, des allégories ou des langages spécifiques qui sont culturellement ancrés. Pour être compris, ces messages doivent s'appuyer sur un socle commun de connaissances et de références partagées.
  • Les mécanismes psychologiques :
    • Confirmation du biais : Nous avons tendance à rechercher et à privilégier les informations qui confirment nos croyances préexistantes. Ainsi, une expérience subjective peut être interprétée comme une confirmation d'une croyance religieuse, même si elle pourrait s'expliquer de manière différente.
    • Projection : Nos désirs, nos peurs et nos attentes peuvent influencer la façon dont nous percevons le monde extérieur. Nous pouvons projeter nos propres croyances et désirs sur une expérience, lui donnant ainsi un sens particulier.
    • Expérience mystique : Certaines expériences religieuses peuvent être associées à des états modifiés de conscience qui peuvent altérer notre perception de la réalité et favoriser l'apparition de phénomènes subjectifs.
  • Le rôle social :
    • Appartenance à un groupe : Les croyances religieuses nous permettent de nous sentir appartenir à une communauté et de partager des valeurs communes. Les expériences religieuses peuvent renforcer ce sentiment d'appartenance et être valorisées au sein du groupe.
    • Influence sociale : Les récits d'expériences religieuses peuvent être influencés par les attentes sociales et les normes culturelles. Les individus peuvent être amenés à conformer leurs expériences pour correspondre à ce qui est considéré comme acceptable et désirable au sein de leur communauté.

Leur conclusion

Il est difficile de fournir une explication unique et définitive à ce phénomène complexe. La manière dont nous interprétons les "apparitions divines" est le résultat d'une interaction complexe entre des facteurs culturels, psychologiques et sociaux. Il est important de garder à l'esprit que ces expériences sont souvent très personnelles et subjectives, et qu'il n'existe pas de vérité absolue à leur sujet.

 

Revenons à notre 5ème assise.

 

« Ainsi, que le bienfait s’étende de manière égale au monde des dharmas sans limite et que soi comme autrui, apaisés, retournions ensemble à la lumière sereine ». 

 

Tout d’abord « Ainsi » est un mot de liaison. La 5ème assise apparaissant à la fin du Gongyō et après la récitation de Daimoku, autrement dit, après que nous ayons accumulé les bienfaits inhérents à ces lecture et récitation, nous exprimons notre vœu que ces bienfaits rejaillissent également sur les mondes de dharmas.

 

Dans l’expression « mondes de dharmas », « dharmas » fait référence aux phénomènes, existences, visibles et invisibles, relevant du sensitif.

 

Quant à « mondes », il s’agit des différences, puisque chaque monde est différent. Il s’agit donc du « non-sensitif ». 

 

Nous souhaitons donc que les bienfaits de la pratique rejaillissent de manière égale sur le sensitif et le non-sensitif des dix mondes et des trois mille (domaines, mondes, ainsi).

 

Quant à la lumière sereine, elle désigne l’état de vie du Bouddha et son territoire. Le chapitre de la Ville transitoire (septième) du Sutra du Lotus énonce :

 

« Notre vœu est que, par ces œuvres et vertus, universellement à tous propagées, nous-mêmes et les êtres, réalisions tous ensemble la voie d’Éveillé ».

 

La formulation de notre assise « et que soi comme autrui, apaisés, retournions ensemble à la lumière sereine » apparaît également dans le Grand Arrêt et contemplation de Zhiyi.

 

Pour conclure, il apparaît évident que les « appels de Dieu », les « apparitions divines » sont toujours des phénomènes qui se produisent du fait d’une volonté extérieure, indépendamment de notre propre volonté et sur la base de concepts déjà connus. C’est le propre de la voie extérieure qui a mené le monde dans l’état où il se trouve aujourd’hui.

 

Par contre, la bouddhéité, l’accès à la terre pure de la lumière toujours sereine pour nous et pour les autres, ne dépend que de notre pratique personnelle et de notre conversion d’autrui. Il n’y a rien de mystique, tout n’est que logique.

 

Question

Dans votre réponse, vous parlez du « Bouddha et de son territoire ». Qu’est-ce que le territoire du Bouddha ? 

 

Réponse

Traditionnellement, le bouddhisme distingue la terre des êtres ordinaires, appelée "Monde de l'endurance" et la terre des Bouddhas appelée "Terre pure".

Zhiyi, quant à lui, distingue quatre catégories de terres pures : 

  1. La terre de la cohabitation des (êtres) ordinaires et des saints (les deux véhicules)
  2. La terre des moyens avec reste, où vivent les auditeurs et les bouddhas pour soi qui ont un reste d'égarements
  3. La terre de la rétribution véritable sans entrave, où vivent les bodhisattvas
  4. La terre de la lumière toujours sereine, dotée des trois vertus de corps de Dharma, sagesse et libération où vivent les Bouddhas.

Dans le Sutra du Lotus, le Bouddha révèle en plusieurs endroits que sa terre de la lumière toujours sereine est en fait la terre de l'endurance.

Notre problème, nous êtres ordinaires, est que nous ne voyons pas les saints, ni le Bouddha. Dans les stances Jiga, nous disons par exemple "suigon ni fuken", ce qui signifie "je suis près d'eux, mais ils ne me voient pas".

 

Mais rassurez-vous, la Terre de la lumière sereine n'est pas ailleurs que dans le monde de l'endurance.

 

Dans le Traité sur le Sens de la substance, Nichiren Daishōnin écrit en effet :

"Celui qui, honnêtement, rejette les moyens, a uniquement foi dans le Sutra de la Fleur du Dharma et récite Nam Myōhōrengekyō, voit les trois voies des mauvaises passions, du karma et de la souffrance se transformer en trois vertus de corps de dharma, sagesse et libération. Les trois visions et les trois vérités apparaissent en son cœur. Le lieu où demeure cet homme est la terre de la lumière toujours sereine".

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